Les magistrats financiers qualifient la fraude de phénomène "mal cerné, mal chiffré, mal traité". Ils déplorent l'absence persistante d'une estimation fiable de "l'écart fiscal" - la différence entre les impôts dus et ceux effectivement perçus - qui empêcherait d'évaluer la performance réelle des services de contrôle. Les chiffres sont éloquents : alors que le total des recettes fiscales a augmenté de 44 % en dix ans, les sommes mises en recouvrement après contrôle fiscal peinent à retrouver leur niveau de 2015, s'élevant à 20 milliards d'euros en 2024. Les montants réellement encaissés sont encore plus faibles, autour de 11,4 milliards d'euros.

Le rapport questionne également l'efficacité des nouvelles technologies comme le "data mining", qui, bien qu'utilisées pour programmer près de la moitié des contrôles, ne sont à l'origine que de 13,8 % des montants recouvrés. Sur le plan pénal, la réforme du "verrou de Bercy" de 2018, qui rendait obligatoire la transmission au parquet des fraudes les plus importantes, produit des résultats mitigés. Si le nombre de dossiers transmis a doublé, le nombre de condamnations stagne, avec 44 % des affaires classées sans suite et seulement 27 % poursuivies devant un tribunal correctionnel, soit moins qu'avant la réforme.